Mythe : « L’intelligence est innée » — on naît brillant ou pas, point final.
En bref :
- Mythe : l’intelligence serait principalement déterminée par la génétique.
- Réalité : gènes et environnement interagissent fortement ; l’« héritabilité » varie selon le contexte.
- Mesure : le QI capture une facette, pas la totalité de l’intelligence.
- Conséquence : croire à l’inné immuable influence l’éducation et le comportement — souvent en pire.
- Action : améliorer l’environnement d’apprentissage reste la stratégie la plus fiable.
On aurait aimé une explication simple : des gènes, un embryon, et hop, voilà un génie. L’histoire est plus compliquée — et bien plus intéressante. La question « l’intelligence est-elle innée ? » agite la psychologie, la génétique et les neurosciences depuis des décennies. Les études sur jumeaux, les scores polygéniques, l’épigénétique et les travaux sur l’impact de l’environnement montrent un tableau nuancé. La notion même d’intelligence est multiple : logique, verbale, sociale, créative, émotionnelle… un seul test (le QI) n’en fait pas le tour, comme le rappelle la méthode pour mesurer le QI.
Pour illustrer le fil conducteur, prenons Emma, élève curieuse d’une banlieue mixte. Selon l’histoire qu’on raconte autour d’elle — « tu es née comme ça » ou « tu peux progresser » — son parcours scolaire et ses chances d’accès à des ressources changent. Ce texte démonte la croyance, explique pourquoi elle persiste et précise ce que savent réellement les sciences, sans oublier l’ironie salutaire : la nature a son mot à dire, mais elle n’écrit pas le scénario final.
Origines de la croyance « l’intelligence est innée » et pourquoi elle séduit
On entend souvent répéter que l’intelligence est une donnée héréditaire figée. Ce mythe puise sa force dans des interprétations simplistes d’études anciennes, dans le recours au QI comme mesure unique, et dans une préférence culturelle pour des explications immédiates et consolantes.
- Facilité cognitive : expliquer par les gènes évite d’analyser des contextes sociaux complexes.
- Attribution sociale : valoriser le « talent naturel » pour expliquer réussite et échec.
- Mauvaise vulgarisation de la génétique : héritabilité ≠ destin.
| Idée reçue | Pourquoi elle tient | Ce que montrent les données |
|---|---|---|
| L’intelligence est entièrement génétique | Simplification des résultats de jumeaux et hérédité | Les études indiquent une héritabilité partielle (≈50–80%) variable selon l’environnement |
| QI = intelligence entière | Pratique, quantifiable | Le QI mesure certains aspects : raisonnement, mémoire de travail, vitesse |
| Succès scolaire = prédiction de réussite adulte | Confusion entre performances temporaires et potentiel | Beaucoup d’adultes brillants n’étaient pas des élèves remarquables |
Insight : croire que l’intelligence est purement innée sert souvent à justifier des inégalités, pas à les comprendre.

Ce que disent les neurosciences et la génétique sur l’intelligence innée
Les neurosciences montrent que le cerveau se construit par interaction constante entre circuits biologiques et stimulations. Les études sur jumeaux ont été cruciales : elles indiquent que la part génétique dans les différences de performance cognitive entre individus est importante, mais elle n’est pas absolue.
- Études de vrais jumeaux : corrélations élevées des performances cognitives.
- Héritabilité estimée : souvent entre 50 % et 80 %, selon les contextes.
- Polygénie : des milliers de variants avec de faibles effets cumulés.
| Concept | Signification | Implication pratique |
|---|---|---|
| Héritabilité | Proportion de variance due aux gènes dans une population | Varie selon environnement ; ≠ prédiction individuelle |
| Polygénie | Nombreux gènes avec petits effets | Scores polygéniques informatifs mais peu prédictifs pour l’individu |
| Épigénétique | Régulation des gènes selon l’environnement | Une enfance stimulante peut activer des trajectoires favorables |
Par exemple, des recherches montrent que des enfants ayant des scores de QI faibles vers six ans ont rattrapé du retard après adoption dans des familles plus stimulantes. Cela illustre la force de l’environnement sur l’expression du potentiel génétique.
Insight : la génétique donne une propension, pas une sentence. L’inné est un point de départ, pas une ligne d’arrivée.

Rôle de l’environnement, de l’apprentissage et de l’éducation
L’apprentissage et la qualité de l’éducation font partie des leviers les plus puissants pour transformer les dispositions génétiques en compétences réelles. Les neurosciences décrivent comment les expériences sculptent les connexions synaptiques — l’écosystème éducatif compte.
- Nutrition et santé précoce : base biologique du développement cognitif.
- Stimulations précoces : langage, jeux, interactions sociales.
- Stress toxique et exposition à des toxines (plomb, alcool) : effets délétères.
| Facteur environnemental | Preuve d’impact | Intervention efficace |
|---|---|---|
| Éducation précoce | Améliore performances cognitives et scolaires | Programmes préscolaires de qualité |
| Conditions matérielles | Humidité, pollution, nuisances affectent l’apprentissage | Améliorer le milieu (ventilation, lutte contre humidité) |
| Stabilité affective | Stress chronique fragilise les fonctions exécutives | Soutien parental, services sociaux |
Pour Emma, une école qui valorise l’effort et propose des ressources adaptées change la trajectoire. Les théories implicites — croire en une intelligence fixe ou en une intelligence malléable — influencent fortement la motivation des élèves.
Insight : améliorer l’environnement éducatif revient à investir sur la transformation des potentiels en compétences réelles.

Conséquences pratiques : éducation, psychologie et questions éthiques
Admettre que l’intelligence n’est pas seulement innée mais le fruit d’un dialogue gènes‑environnement change la façon d’enseigner, d’évaluer et de concevoir les politiques publiques. Cela remet en cause les discours fatalistes et invite à des actions concrètes.
- Éducation : privilégier pédagogies actives, feedback constructif et stimulation précoce.
- Psychologie : promouvoir l’état d’esprit de développement plutôt que l’étiquetage.
- Éthique : surveiller l’usage des scores génétiques ; refuser les politiques déterministes.
| Défi | Solution recommandée | Exemple concret |
|---|---|---|
| Étiquetage scolaire | Évaluations formatives, remédiation précoce | Programmes d’été pour rattrapage |
| Interprétation génétique | Transparence et prudence scientifique | Ne pas utiliser scores polygéniques pour décisions éducatives |
| Inégalités d’accès | Politiques ciblées sur l’environnement | Investir dans la petite enfance et les écoles défavorisées |
Le débat public doit éviter deux erreurs : d’un côté, l’angélisme qui néglige l’effet des gènes ; de l’autre, le déterminisme qui transforme la nature en justificatif d’inégalités. La recherche récente rappelle la prudence : améliorer les contextes éducatifs est la voie la plus robuste pour augmenter les capacités cognitives collectives.
Pour qui veut aller plus loin sur la manière dont les mythes circulent, le mythe des 10% illustre comment une idée simple devient une croyance tenace. Pour comparer l’humain et la machine et ne pas confondre « performance » et « compréhension », voir l’article sur l’intelligence artificielle. Les débats sur l’intelligence passent aussi par la comparaison avec l’intelligence animale et par des outils de mesure (comment mesurer le QI) dont les limites sont à connaître. Enfin, les conditions matérielles d’un bon apprentissage (air, température, lumière) comptent : penser à l’impact de l’environnement matériel sur la concentration n’est pas anecdotique.
Insight : agir sur l’environnement éducatif, social et sanitaire demeure la meilleure façon d’augmenter les chances réelles, pour Emma comme pour la société entière.

L’héritabilité de l’intelligence signifie-t-elle qu’on est condamné par ses gènes ?
Non. L’héritabilité décrit la part de variance observée dans une population attribuable aux gènes, pas un destin individuel. L’environnement et l’apprentissage modifient fortement les trajectoires.
Le QI suffit-il pour évaluer l’intelligence d’une personne ?
Non. Le QI mesure des compétences cognitives spécifiques (raisonnement, mémoire de travail), mais pas la créativité, l’intelligence émotionnelle ou sociale. Il faut des évaluations complémentaires.
Les scores polygéniques peuvent-ils prédire le potentiel intellectuel d’un enfant ?
Les scores polygéniques renseignent sur la propension génétique mais restent peu précis pour prédire individuellement. Ils ignorent l’épigénétique et l’environnement.
Que faire concrètement pour favoriser le développement intellectuel d’un enfant ?
Offrir une alimentation saine, un environnement stable et stimulant, des interactions riches (langage, jeux), un accès à une éducation de qualité et réduire le stress chronique sont des interventions efficaces.
